"Notre-Dame-des-Landes : la résurrection ?" Un débat animé par Caroline Roux. À voir ici.
Notre-Dame-des-Landes : une idéologie radicale derrière la ZAD
par Pascal Perri
Les habitants de Loire-Atlantique ont voté à 55% pour la construction de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Pour Pascal Perri, les militants écolos-zadistes ne sont pas seulement opposés au nouvel aéroport, mais plus largement, de manière idéologique, à toute forme de progrès technique.
Et maintenant? Les électeurs de Loire-Atlantique ont très majoritairement dit oui au projet de transfert de l'aéroport de Nantes-Atlantique à Notre-Dame-des-Landes. Après les travaux de la commission du dialogue, après 154 recours des opposants purgés par les tribunaux, le projet a été validé par voie démocratique. On pourra toujours ergoter sur le périmètre de la consultation, sur la question posée, sur l'opportunité ou non de consulter les électeurs, Notre-Dame-des-Landes est un projet légal et désormais plus légitime que jamais. Les écologistes et leurs alliés zadistes ont perdu. Pourtant, jamais une minorité n'avait eu droit à autant d'espace d'expression. Les occupants illégaux ont trouvé des alliés partout : chez les politiques, dans une certaine presse bien pensante, sur les plateaux de télévision. Ils ont été sur-représentés. La République a été bonne mère en laissant ces groupes marginaux occuper sans droit ni titre un espace du territoire national. Ni les policiers, ni les juges n'y avaient accès. Notre-Dame-des-Landes était devenu non pas un espace de résistance mais un espace d'insubordination généralisée.
(...) Dimanche soir et lundi matin, après l'annonce officielle des résultats, les responsables de EELV ont montré leur vrai visage. Ils encouragent encore l'occupation et, disent-ils, «la résistance» contre le chantier du nouvel aéroport. Que faudra-t-il pour qu'ils acceptent enfin la vox populi ? Leur stratégie d'alliance avec les occupants a été invalidée. Ils ne peuvent s'en prendre qu'à eux-mêmes. Tout d'abord, les Verts ont commis l'erreur de couvrir les violences de certains zadistes. Entre le saccage du centre-ville de Nantes et de Rennes et les actes d'intimidation à l'égard des riverains de la ZAD, l'opinion s'est aperçue que ces militants n'étaient pas, comme ils le prétendaient, de sympathiques Robin des Bois. Les électeurs du Oui ont autant voté pour le démantèlement de la ZAD que pour le transfert de l'aéroport. Les encouragements sans discernement aux zadistes de José Bové, Cécile Duflot et Eva Joly condamnaient les Verts à la radicalité. En poursuivant dans cette voie suicidaire, ils prennent la responsabilité des dégâts qui pourraient être associés à l'évacuation de la ZAD à l'automne prochain. Une des responsables de l'ACIPA, une association contre NDDL a même affirmé que l'évacuation de Notre Dame serait pire qu'à Sivens où un jeune homme, Rémi Fraisse, avait trouvé la mort.
Les militants écolos-zadistes de Notre-Dame ne sont pas seulement opposés au nouvel aéroport, ils sont en réalité opposés à toute forme de transport aérien. Ils considèrent les déplacements aériens comme un outil du marché au service de sa domination sur les individus. Ils dénoncent la marchandisation de la production et des voyages. Leurs maîtres à penser ont tous pris position contre l'ordre social actuel : Ivan Illich qui soutenait une société sans école, car l'école prépare à la société industrielle, Pierre Rabhi, Serge Latouche, tous opposés à la croissance économique, défenseurs de sociétés fondées sur le modèle «locavore», c'est-à-dire sur un modèle de proximité, synonyme de glaciation de la vie sociale et des échanges. Les ZAD sont des laboratoires de décroissance. La particularité de ce courant de pensée s'exprime essentiellement dans sa radicalité. Le mouvement des ZAD est totalisant (il est un modèle d'organisation de la vie quotidienne comme un code de conduite) et totalitaire (il doit être imposé à toute la société y compris au moyen de la contrainte).
Les électeurs de Loire-Atlantique ont décidé de mettre fin au long feuilleton de Notre-Dame. Est-ce pour autant la fin de l'histoire? La semaine dernière on apprenait que des militants hostiles à un chantier de loisir et de logement occupaient un terrain à Villenave-d'Ornon dans la banlieue de Bordeaux. L'Etat et les élus sont désormais avertis.
LCI Soir
Pascal Perri était l'invité de Marie-Aline Méliyi et Philippe Ballard dans "Un livre, un auteur". Extraits à retrouver ici et là.
"La parole aux auteurs : Pascal Perri et Béatrice Jousset-Couturier." Une rencontre animée par Emmanuel Lechypre. À voir ici.
Sivens : L'Écologie contre la démocratie,
le nouveau livre de Pascal Perri
Le reportage de Christophe Chassaigne est à voir ici.
Version écrite :
Dans L'Écologie contre la démocratie, le célèbre chroniqueur, connu pour ses livres polémiques sur Air France, Google, la SNCF ou EDF s'intéresse au projet politique des "écolos-zadistes" de Sivens et Notre-Dame-des-Landes. Interview réalisée sur le site de la retenue de Sivens.
Que voyez-vous en regardant le vallon du Testet, ici dans la forêt de Sivens ?
Pascal Perri : Ce que je vois ce n'est pas le site d'un grand projet mais une paisible petite vallée isolée du Tarn qui devait accueillir une modeste retenue d'eau. L'avantage ici c'est qu'il y
a des forêts et des zones de repli... C'est donc le terrain idéal pour organiser une petite guerre moderne.
Pourquoi écrire un livre sur ces conflits autour de l'écologie ?
A Sivens comme à Notre-Dame-des-Landes, il y a la force d'un petit territoire, une unité de temps et d'espace. Et puis il y a ces histoires, ces récits, comme la plupart des journaux traitant
l'actualité cherchent à en produire aujourd'hui avec deux adversaires clairement identifés : les agriculteurs d'un côté, les écolo-zadistes de l'autre. Les zadistes sont très peu représentés
dans notre société. Leurs méthodes radicales et leur philosophie nihiliste obtiennent peu d'écho habituellement mais ils trouvent dans ces conflits de formidables caisses de résonance pour leurs
idées. C'est une petite communauté en rupture avec la société globale mais, sur ces terrains d'expression, ils peuvent mettre leurs idées en marche. Les zadistes sont contre l'économie et pour la
décroissance, contre la société de consommation, contre tous les projets d'aménagement que notre société développe : routes, retenues, centres de loisir, aéroports.
C'est aussi l'histoire d'une formidable manipulation. On a raconté à l'opinion publique une fable. Comme lorsque les réseaux sociaux véhiculent des théories simples, séduisantes mais fausses, ici les
réalités sont travesties... A Sivens, il n'y a évidemment pas de barrage pharaonique ! Mais un petit groupe d'individus habiles a su tirer un profit maximum d'une situation banale : Un petit projet
d'aménagement rural a engendré une polémique totalement surdimensionnée.
Les combats écologiques sont souvent présentés avec un certain "romantisme", ce n'est pas le cas dans votre livre...
J'ai surtout voulu souligner un grand nombre de mensonges reproduits à l'infini dans les reportages traitants de ces questions car, en matière d'information, la guerre se gagne d'abord avec des mots.
Il est par exemple souvent évoqué de "Grands Projets Inutiles Imposés"... Bon, en venant ici il est facile de constater que le projet n'est pas immense, qu'il a une utilité pour les petites
exploitations des environs et qu'il n'est pas imposé mais bien demandé par les agriculteurs. Il n'y a pas d'immenses murs de béton et ce n'est pas une vallée habitée qui doit être noyée.
Pourtant les opposants ont gagné ! La construction de la retenue a été bloquée par Ségolène Royal...
Ce que les zadistes et leurs alliés écologistes ont réussi à imposer aux journalistes c'est leur terminologie, "leurs" mots de la guerre : projets imposés, agriculture extensive et productiviste,
résistance pacifique, agro business... Tout ça c'est du vent. La vérité c'est que, dans ce territoire, il n'y a que de petites exploitations et des agriculteurs qui gagnent péniblement leur vie. Mais
les zadistes ont obligé leurs adversaires à utiliser ces mots et à venir sur leur propre terrain guerrier, à s'énerver, à menacer... Alors même que ces agriculteurs, peu habitués - eux - à
s'exprimer, voulaient juste rétablir la vérité sur leur situation et la taille de leurs exploitations ! En amenant leurs adversaires sur le terrain guerrier qu'ils avaient choisi, les écolo-zadistes
ont marqué des points importants aux yeux d'une opinion mal informée. La vérité a été une victime collatérale de ces "récits d'actualité" quelquefois dignes de fictions.
Il y a beaucoup de petits projets d'aménagements en France... Pourquoi les "écolo-zadistes" ont-ils choisi cette polémique locale ?
Ces "histoires" sont des leviers formidables pour des groupes minoritaires mais très actifs et très organisés. S'il y avait un référendum, ces pensées là seraient marginalisées... Tout comme
lorsqu'il y a des élections ici, les écologistes ne dépassent pas les 10 % ! C'est l'effet d'une loupe grossissante. Cela permet à des gens actifs et organisés d'exister. Les zadistes ont une vraie
stratégie, ils savent quels sont les mots à produire, à diffuser pour manipuler les médias et l'opinion et arriver à leurs fins. Ici, le terrain était formidable.
L'entité politique "Europe-Ecologie Les Verts" a-t-elle besoin des zadistes ?
Les Verts utilisent beaucoup les zadistes en prônant notamment une démocratie participative... Pourquoi ? Simplement parce que, dans la démocratie élective, leur place est marginale. Lorsque les
électeurs donnent leur avis, les écologistes n'obtiennent pas souvent la majorité. Mais là, on a une troupe militaire - les zadistes - qui occupe le terrain, et un groupe politique démilitarisé - les
écologistes - avec quelques figures de proue comme José Bové qui peuvent négocier.
A Sivens ou à Notre Dame des Landes, une entité politique, les Verts, trouve un moyen d'imposer ses idées, d'agir sur l'actualité en encourageant les petits actes d'insubordination. Même
si quelquefois - comme ici - cela se termine mal... Car ces actions sont dangereuses ! Le problème des Verts en France c'est d'abord que la démocratie est
élective et ensuite... qu'elle a fait ses preuves !
"Manifestations violentes : qui va payer la facture ?" Un débat animé par Fabrice Lundy. À voir ici.
"Il faut absolument lire le livre de Pascal Perri pour comprendre que les gens qui étaient dans la rue hier et qui ont cassé n'étaient pas des manifestants contre la loi travail. Ce sont des radicaux, des professionnels de la casse et de la violence, que l'on retrouve à Sivens, à Notre-Dame-des-Landes, que l'on retrouve à Calais sous le nom de No border..." Laurent Neumann
À voir ici.