Gilles Sebhan

HORS CLASSE
Un traité d'immaturité

 

 

 

192 pages, 18 euros

14 octobre 2022

 

 

REVUE DE PRESSE

Le Point, 2 mars 2023

Récits – Deux portraits de professeurs

Par Claude Arnaud

 

Alors que l’actualité témoigne du pire, deux ouvrages reviennent sur ce qui fait l’essence du métier d’enseignant, la transmission.
 
 
[...]
Trouble. Qu'il entre du désir dans les relations entre enseignants et élèves et qu'il soit difficile de se l'avouer, on en aura une nouvelle preuve en lisant le récit de Gilles Sebhan. Agrégé de lettres et écrivain, Sebhan enseigne depuis trente ans le français dans des collèges parfois difficiles, et il ne cache rien des défis qu'il affronte au quotidien. Mais lui qui déplorait la baisse du niveau, à ses débuts, a appris, l'âge aidant, à aimer son métier, jusqu'à y trouver une seconde jeunesse. Il est assez franc pour tout dire de son effroi devant la montée des pressions islamistes, bien avant la décapitation de Samuel Paty, et de sa peur d'être un jour accusé de méfait sexuel. Sans illusion, sans ressentiment non plus, il parle de sa stupeur devant l'impuissance de la police à protéger l'école comme de son désarroi devant la dénégation massive chez ses élèves, filles comprises, du viol commis par l'un d'eux, la victime ne pouvant être qu'une « pute ». Lui qui ne comptait enseigner que le temps de se faire un nom comme écrivain a découvert aussi le charme inhérent à une certaine immaturité et l'émotion des classes à qui il parle de ses livres. Lucide sur ces mini-adultes qui se contentent, sur les questions morales, de crier au scandale par ouï-dire, il l'est aussi sur la peur qu'ils savent entretenir chez leurs profs - lui l'a payé durant des années de terribles maux de ventre. Grandeur et misère des hussards que la République laisse trop souvent affronter seuls les effets insidieux du déclin des Lumières et du triomphe de l'image.

LH Le Mag, 29 septembre 2022

Double Je(u)

Par Jean-Claude Perrier

 

Il est à peine question de sa peinture, dans Hors classe. Pourtant elle incarne bien la personnalité de Gilles Sebhan. Ce sont surtout des portraits de jeunes hommes, la plupart arabes. Il est aussi peu question de sa judéité, largement évoquée dans La dette (Gallimard, 2006), roman sur son père, sépharade marocain rescapé d’Auschwitz, puis soldat pendant la guerre d’Algérie. Il est en revanche beaucoup question de son homosexualité, et de son métier de professeur de français dans un collègeen ZEP,puis dans lel ycéede banlieue où il a jadis été élève. Avec ses collègues, les rapports sont à peu près corrects. Avec ses élèves, complexes. Un mélange de séduction réciproque, de fascination pour ceux qu’il nomme les « cancres », d’ambiguïté et de jeu. Sebhan est un pseudonyme, mais

tout le monde finit par le découvrir et savoir que le prof est écrivain, et gay.
Il en est ravi, il a tout fait pour, quitte à encourir, à cause certains de ses livres sulfureux (Haut risque, PARC, 2003), quelques ennuis. L’auteur excelle
dans le sfumato, le flou artistique, le télescopage : son récit va et vient, sans dates, et les noms sont floutés, même celui de « l’infâme » Tony Duvert, à qui il a consacré une bio (L’enfant silencieux, Denoël, 2010) et un essai (Retour à Duvert, Le Dilettante, 2015).

À travers son expérience se dessine un état des lieux accablant de notre Éducation nationale, dont les maux vont jusqu’au terrorisme, le déclencheur de Hors classe ayant été l’assassinat de Samuel Paty.

Tout ici sonne juste, sans pathos.

Littérature du réel, enquêtes, essais, histoire.

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